burkina faso : l'opposition pose ses conditions !!!
La lettre ouverte dont teneur suit est signée du chef de file de l’opposition. Me Sankara, répondant au ministre d’Etat chargé des Réformes politiques, y réaffirme la volonté de l’opposition de défendre ses points de vue, notamment en ce qui concerne l’article 37.
Monsieur le Ministre,
“J’ai l’honneur d’accuser réception de votre lettre ci-dessus référencée par laquelle vous nous demandez de prendre des dispositions pour vous faire parvenir les propositions de réformes des partis politiques de l’opposition au plus tard le 16 mai 201l. Tout en m’excusant du retard avec lequel je donne suite à votre courrier, au regard des larges échanges que les responsables des partis politiques de l’opposition ont eus à travers plusieurs rencontres, je voudrais au nom ceux-ci vous faire part des conclusions auxquelles ils sont parvenus à leur dernière assemblée générale du 16 mai 201l.
En effet, rappelant sa déclaration du 04 avril 20 Il sur la situation nationale (Cf. copie), l’opposition politique au regard de la conjoncture politique que traverse notre pays depuis quatre (04) mois, tenant compte des fortes aspirations du peuple burkinabé au changement et à l’alternance démocratique et confortée dans sa conviction que seules des réformes sincères et inclusives permettront au Burkina Faso de s’enraciner dans la démocratie, souligne avec force :
que les partis politiques de l’opposition ont toujours exigé des réformes politiques et institutionnelles profondes et appropriées ;
que le rapport du « Collège de sages » et celui du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (M.A.E.P.) sont toujours d’une actualité brûlante et peuvent servir de base de travail ;
qu’au demeurant, des partis politiques à travers plusieurs regroupements ainsi que des organisations de la société civile se sont exprimés, voire transmis comme ce fut le cas en 2009 des propositions et suggestions qui sont restées malheureusement lettres mortes et sans suite conséquente du fait d’une totale absence de volonté politique. En revanche, les partis politiques de l’opposition déplorent le fait qu’il faut chaque fois des crises macabres pour que Monsieur Blaise Compaoré sorte de son mutisme pour faire des promesses auxquelles il ne tient jamais, une fois la crise terminée.
Aussi, les partis politiques de l’opposition tirant leçon des pirouettes du chef de l’Etat, Monsieur Blaise Compaoré, qui déclare que la crise est terminée alors même que son parti, le CDP reconnaît dans une déclaration le 1er mai 2011 que : « notre pays est entré dans une zone de turbulences et connaît ainsi des profondes secousses d’ordre social, politique, économique et militaire... », sont convaincus que la présente crise est grave, profonde et structurelle et touche tous les secteurs de la vie nationale.
Il est, par conséquent, évident que les réformes envisagées doivent concerner tout le peuple burkinabè et cela, dans un cadre neutre, crédible et consensuel. Ce cadre, contrairement au Conseil consultatif sur les réformes politiques (C.C.R.P.), ne devrait pas être seulement consultatif.
Ses délibérations devraient pouvoir s’imposer aux institutions de la République en commençant par le Chef de l’Etat lui-même qui est à son dernier mandat conformément à notre Constitution. C’est pourquoi l’opposition politique, forte de la pertinence de ses arguments, réaffirme sa disponibilité à défendre partout ses points de vue, y compris même au niveau du C.C.R.P. quoique celui-ci soit récusable au regard de sa composition, de son fonctionnement, de ses attributions ainsi que de sa nature.
A cet effet, les partis politiques de l’opposition réunis en assemblée générale le 16 mai 2011 ont décidé de participer aux travaux du C.C.R.P. mais à condition que la modification de l’article 37 ne soit pas à l’ordre du jour, Monsieur Blaise Compaoré étant à son dernier mandat et ne peut prétendre se représenter à la prochaine élection présidentielle de 2015. Ils invitent, d’ores et déjà, le CDP à renoncer à son projet de réviser l’article 37, car s’il doit y avoir révision, il s’agira plutôt de sacraliser la disposition dudit article en l’intégrant purement et simplement à l’actuel article 165 de la Constitution.
Monsieur le Ministre,
L’opposition politique suggère également que le décret n°2011-262/PRES/PM/MPRP du 13 avril 2011, portant création et attributions du Cadre consultatif sur le réformes politiques (C.C.R.P.), soit relu pour prendre en compte ses observations afin de garantir la neutralité et la crédibilité du cadre ; toutes choses pouvant créer la confiance entre tous les acteurs intéressés aux réformes politiques.
C’est donc sous réserve des conditionnalités ci-dessus exposées que les partis politiques de l’opposition vous verseront leurs propositions qui portent essentiellement sur leur engagement à offrir à notre peuple une vraie démocratie par une meilleure gouvernance et la lutte contre la vie chère, la fraude, la corruption et l’impunité. L’opposition politique propose en conséquence en sus du rapport du Collège de sages et celui du M.A.E.P. que les points suivants puissent être examinés :
la dépolitisation de l’administration publique ;
la réforme de l’administration ;
la réforme du système éducatif ;
la réforme de la justice ;
la transparence des marchés publics ;
l’amélioration des conditions de vie et d’études des élèves et étudiants ;
l’amélioration des conditions de vie des travailleurs ;
la prise en compte des besoins des populations notamment rurales ;
la lumière sur les crimes de sang et les crimes économiques ;
la dissolution et la refondation de la CENI à travers la relecture du Code électoral ;
la réforme du Conseil constitutionnel ;
la réforme de la Cour des comptes ;
le statut de la Chefferie coutumière ;
la réforme de la Commission de l’informatique et des libertés (CIL) ;
la révision du statut de l’opposition ;
l’adoption d’un calendrier électoral clair et précis ;
la révision de la loi sur le financement des partis politiques ; l’instauration d’impératifs sur la bonne gouvernance, etc. Dans l’espoir que vous resterez attentif aux avis et suggestions des partis politiques de l’opposition, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre d’Etat, l’assurance de mes sentiments distingués.
Pour les partis politiques de l’opposition
Le chef de file de l’opposition politique
Maître Bénéwendé Stanislas Sankara
Président UNIR/MS/PS